Nous avons traversé depuis la crise financière de 2008 une période qui est sur le point de s’achever.
Cette période se caractérisait par :
- Une croissance et une inflation modérées
- Des taux d’intérêts très bas
- Le soutien massif des banques centrales à l’économie (et aux marchés)
- Une modération salariale pour contrer la concurrence des pays émergents
- Des marges bénéficiaires confortables et en augmentation du fait des points cités plus haut
Ce contexte a été particulièrement favorable aux marchés financiers et à leurs performances. En effet, hausse des résultats, hausse des multiples de valorisation ont constitué un terrain favorable en particulier aux valeurs de croissance (au détriment des valeurs « value »). On pourra y ajouter les doses de liquidités injectées par les banques centrales à chaque fois que les marchés toussaient.
L’invité surprise :
Le surprenant et tonitruant retour de l’inflation est venu complètement transformer le contexte.
La hausse des prix a trouvé son origine dans les retards d’approvisionnement post COVID et la hausse des prix de l’énergie. L’inflation conjoncturelle menace de devenir structurelle quand elle se transmet aux salaires, c’est le risque principal qui est en train de se matérialiser.
En effet, le quasi plein emploi, le ralentissement de la mondialisation du travail donnent plus de poids aux salariés des pays développés dans leurs négociations salariales.
Sont venus s’ajouter à tout cela la politique de la Chine sur le COVID et le conflit armé en Ukraine. Ces événements ont continué à alimenter la hausse des prix notamment de l’énergie et des matières premières alimentaires ainsi que les coûts liés aux retards logistiques.
Les conséquences économiques sont d’importance :
- Les banques centrales n’ont d’autres choix que d’actionner les freins en augmentant les taux d’intérêts avec un objectif assumé de récession aux Etats Unis.
- Le pouvoir d’achat des ménages baisse, ce qui pèse sur la consommation
- Les marges des entreprises baissent
- Le prix des obligations baisse avec une « double peine » pour les obligations d’entreprise du fait d’une augmentation de l’aversion aux risques qui se traduit par une augmentation des spreads (les marchés anticipent des révisions en baisse des bénéfices)
- Le prix des actions baisse du fait de la contraction des primes de risque. En particulier pour les valeurs de croissance très valorisées
- Les bulles créées par les excès de liquidités se dégonflent en particulier sur les actifs et secteurs très spéculatifs (valeurs technos non rentables, SPAC, Cryptomonnaies, …) et à l’inverse revalorisation du secteur value (valeurs défensives décotées).
Il semble donc dans ce contexte que les marchés actions et obligataires des pays développés peuvent continuer à baisser.
L’expression qui revient régulièrement est changement de paradigme. En effet, les marchés ont été dopés aux liquidités depuis la grande crise financière des années 2007-2008. Le sevrage qui s’est amorcé va fondamentalement changer la donne.
Comme dans toute période trouble, l’évolution en cours devrait être source d’opportunités.
- Jusqu’à un certain point le private-equity et l’immobilier ne devraient pas être touchés à court terme par l’évolution des taux mais seront forcément impactés.
- Les valeurs dites disruptives et certaines GAFAMs dont les prix sont devenus excessifs vont continuer à souffrir. Quant aux valeurs défensives dites value, elles devraient bénéficier de ce nouvel environnement de taux. On citera les valeurs Telecom, la pharmacie, les utilities, la distribution, … qui ont largement sous performé dans l’univers de taux bas de ces dernières années. D’autres secteurs très décotés pourraient être intéressants mais en conservant une certaine prudence (l’automobile, les financières, …).
- Du coté des obligations, le timing est assez intéressant pour se positionner sur des emprunts corporate qui ont souffert de l’écartement des spreads et qui bénéficient d’un portage intéressant en terme de rendement. Cependant on restera extrêmement prudent avec la dette en particulier avec celle des Etats qui devrait continuer à perdre de la valeur du fait de la hausse des taux. En effet, les taux réels, c’est-à-dire les taux d’intérêts déduction faite de l’inflation restent en territoire négatif et devraient inciter les banques centrales et les marchés à poursuivre la hausse déjà entamée.
Et maintenant ?
A ce stade, il est assez difficile de dire à quelle vitesse et quand se feront ces différentes évolutions. On constatera forcément des périodes de correction suivies de rebonds autant pour des raisons techniques que pour des raisons liées à la conjoncture mais d’un point de vue structurel il semble bel et bien que le mouvement de changement de cycle soit enclenché avec des effets jusqu’en 2023.
Les maitres mots pour les mois à venir devraient donc être prudence et opportunisme. L’expression « cash is king » est donc plus que jamais de rigueur, le positionnement sur des valeurs défensives non liées au cycle pourra également être une option intéressante.
D’un point de vue gestion collective, les fonds alternatifs de type long short ou certains global macro pourraient tirer profit de ce type de marchés.
Achevé de rédiger le 30/05/2022
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